Etudes sur Tchouang-tseu (French Edition) by BILLETER Jean François

Etudes sur Tchouang-tseu (French Edition) by BILLETER Jean François

Auteur:BILLETER, Jean François [BILLETER, Jean François]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782844857613
Éditeur: Editions Allia
Publié: 2013-10-22T16:00:00+00:00


Les suites

A la fin de son livre, Jean Levi donne un aperçu de la postérité de Confucius. En 72 pages, il mène le lecteur du lendemain de sa mort à aujourd’hui. Ayant bien montré qui a été Confucius, il lui est facile de montrer à quel point il a été trahi. Ses jugements sont sans appel. Ils paraîtront peut-être sommaires, car il s’en tient à l’essentiel et va vite. Je pense pour ma part qu’il voit juste. Si l’on en croit Seu-ma Ts’ien, la dévotion commence dès le lendemain de la mort du maître. D’autres sources montrent que bien vite apparaissent les arguties sur le sens de ses propos, qui sont devenus paroles d’évangile. Tseng-tseu joue le rôle le plus calamiteux, il ne retient que la piété filiale – qui était certes présente chez Confucius, mais avec quelle ambiguïté ! Il lui voue “un culte exclusif et buté”. Avec lui, elle “devient un catéchisme, et les funérailles de véritables messes”. Les textes de l’époque mentionnent les confucianistes comme des maîtres de cérémonie itinérants qui se font payer pour ordonner la mise en scène de la douleur des descendants, selon des règles qu’ils ont intérêt à compliquer autant que possible et qui tournent au “byzantinisme protocolaire”. Ils rédigent des traités qui figureront le moment venu parmi les écritures canoniques du confucianisme et développent, sur le rituel, une phraséologie apologétique qui justifiera ultérieurement la ritualisation de la vie sociale, puissant moyen de maintien de l’ordre établi. Car, “dans la mesure où la conformité est jouée, représentée sous une forme rituellement correcte, son caractère coercitif est occulté par la perfection formelle” de l’exécution et par la délectation esthétique qui en découle (p. 246). Le sens des formes y trouvera son compte, mais la sclérose sera absolue du point de vue religieux. La “vacuité” qui est au cœur de l’idéologie lettrée ne sera jamais comblée, écrit Jean Levi, sinon par des suppléments d’âme demandés à la cosmologie, au taoïsme ou au bouddhisme. Jean Levi a raison de rappeler le conservatisme foncier du “confucianisme” qui est sorti de là.

Mencius (env. 380-290) et Sun-tseu (env. 298-235)271 sont considérés comme les deux grands philosophes confucianistes de l’antiquité. Ils se sont l’un et l’autre réclamés de Confucius, en effet, mais la filiation est usurpée dans les deux cas. Mencius est un ambitieux qui tente de faire carrière auprès des puissants de son temps en les convaincant, par des procédés rhétoriques dont la mauvaise foi est souvent patente, qu’ils ont intérêt à être bons, ou, plus exactement, qu’ils sont bons et qu’ils ont intérêt à le montrer. L’enseignement de Confucius est totalement dévoyé. Mencius est considéré aujourd’hui comme un penseur vertueux, défenseur du tyrannicide, démocrate avant la lettre, auteur d’une morale entièrement fondée sur la nature, avocat de la bonté foncière de l’homme, etc. Jean Levi démontre qu’aucun de ces lieux communs ne résiste à l’examen et que François Jullien se trompe entièrement sur le compte de Mencius en le mettant sur le même pied que Rousseau et Kant272 .



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